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« MARS 2221, roman » (chap 45 : « Fallue normande », suite et fin)

Ce matin, avant notre relecture quotidienne et gratuite, prenons le temps de renouveler aux « producteurs de foie gras » (‘tain mais c’est pas un métier ça, les filles !) toutes nos injures ordurières les plus sincères, à partager avec leurs ienclis. Comment on peut être aussi dépravé (et inconséquent)? S’autocongratuler de la libération de Paul Watson et direct foncer bouffer le foie cirrhosé d’un malheureux volatile forcé jour après jour d’ingurgiter des tonnes de céréales, transgéniques de préférence. Joyeusement coachés par franceinfofff (prononciation maison, « dans le souffle » c’est + hype) et ses pubs immondes à la gloire des psychos du sud-ouest et le « respect ancestral » (opus citatum) qu’ils vouent à leurs souffre-douleur à plumes… 

Allez on essaie d’oublier ces chiens malades, c’est l’heure de « MARS 2221, roman ».

résumé : l’embarras du choix…

– J’espère que Monsieur a passé une bonne nuit. Pour le petit-déjeuner de Madame et Monsieur, je me permets de suggérer à Monsieur une soupe ganjü et ses bamkas à la magellane. Très énergisant !

– Je vous crois sur parole mais ce matin, Madame et Monsieur se satisferont d’un pot de caoua et d’une brioche ou deux pour éponger.

– Ka…Wa ? Monsieur me voit terriblement confus…

– C’est moi. Mon parler emprunte trop souvent au registre populaire. Quand il est pas truffé de grossièretés. Pire, si vous aviez lu Hippocampe Twist, vous sauriez que je dis jamais « ne pas ».  Formulé autrement, auriez-vous l’extrême obligeance de nous préparer une cafetière de votre meilleur arabica ?

– Mais certainement Monsieur. Que Monsieur m’excuse. J’entre immédiatement « kawa » dans ma base de données. Pour les brioches, Parisiennes ou de Nanterre ? À moins que Madame et Monsieur aient une préférence pour les biterroises ? Les tressées de Metz ? Je peux aussi leur proposer des cougnous. Des bescoins peut-être ? Des pognes ? Une gâche ? De la fougasse d’Aigues Mortes ? De la fallue normande ?

De la fallue normande !

– Vous auriez de la fallue normande ??? Nappée de confiture de rhubarbe, c’est dar dar dar ! Mettez m’en donc deux ou trois tranches, s’il vous plaît !

Quelque part dans les entrailles de la taverna un percolateur, un mixer et un four entrent en action. Dans la minute un tiroir s’ouvre sur un double petit déj’ princier.

– Madame et Monsieur désirent être servis dans leur chambre ?

– Carrément !

Par l’opération du St Esprit et du graviton réunis, le plateau chargé de victuailles roboratives speede illico presto vers la cambuse tout en marbre de Céphée. Quand je le rattrape, Anthéa est déjà occupée à remplir les tasses. Une demi-heure plus tard, ayant picoré les dernières miettes de fallue, elle aborde la question épineuse de notre situation matérielle.

– Dis-voir, lapin. Hier, pendant que tu tchatchais avec Ovaï-Lân-Try j’ai repéré une boutique de fringues plutôt coolos à l’entrée de la galerie. Ce qui m’amène à te poser la question. Quand as-tu prévu de nous gagner des sous ?

– Dès que tu t’en sors avec le Peregrin SF4. Finalement je suis pas sûr d’en avoir bien intégré le mode d’emploi.

Va savoir ce que le robot cuistot a mis dans son arabica (ou sa fallue normande ?) ! De purs antéchinus ! Il est pas loin de seize heures quand on émerge de notre grasse après-midi récupératrice. Un détour par l’alcôve ciel de pluie et andiamo ! Le moment est venu de savoir si je suis vraiment en mesure de faire quelque chose pour la garde-robe d’Anthéa.

 

…demain chap 46 : « Allo c’est Johnny »…

« MARS 2221, roman » (chap 45 : « Fallue normande »)

  1. Fallue normande

Qu’est-ce que c’était que ce barrissement ? », me demande ma mère qui vient de me gauler le nez dans le placard de la cuisine, en train de finir la plaque de chocolat blanc Suchard alors qu’on va manger dans cinq minutes. J’ai pas le temps de lui répondre qu’un tricératops arrive au grand galop. Il freine des quatre fers à deux millimètres de nous. Avec deux cornes en moins on dirait le rhinocéros de la blague. Je m’attends à ce qu’il s’insurge : « Ça un chou-fleur ??? Et mon œil !!! » mais non il repart comme il était venu, me laissant dans l’expectative. Ma reum a disparu également. J’avais pas remarqué mais je suis au bord de l’océan. Des rouleaux mousseux émerge alors un poulpe géant. Il me salue à l’hindoue, deux tentacules gluants joints cérémonieusement à hauteur de sa tête d’oiseau migrateur. Et replonge direct, effrayé par la survenue bruyante d’un scooter des mers. Au volant un gorille rose à oreilles de cocker qui m’invite à monter en croupe. On trace vers le large dans un nuage d’écume quand, surgissant de nulle part, non pas un aigle noir, mais une baleine volante. Qui nous couvre de son ombre avant d’amerrir un peu plus loin, pile poil entre deux récifs longs comme des jours sans pain. Vite fait elle replie ses méga battoirs de chauve-souris, lâche un grand jet de vapeur avant de se transformer en courant d’air ! Le gorille se retourne vers moi et me conseille d’attacher ma ceinture, décollage immédiat. Le VNM se transforme en ULM. Je préviens le gorille que je vais sûrement vomir. À ce qu’il m’explique, l’acrophobie est presque toujours liée à d’autres peurs. La peur de l’échec, la peur de pas être comme les autres, la peur de décevoir etc… Craignant pour le skaï de sa selle, il accepte toutefois de me larguer sur un îlot qui vient de se matérialiser sous sa pétoire ailée. Me voici maintenant dans une forêt plus que primaire, à cueillir des champignons en compagnie d’un genre de cochon d’Inde sapé en Arlequin. On sympathise. Il me confie que dans le civil il est ophtalmo. C’est là qu’éclate un gros orage. Sauve-qui-peut général !

– Lapin !!! T’as fini de faire des bonds comme ça ? Et tiens, puisqu’on est réveillés si tu allais nous chercher de quoi petit-déjeuner ?

La voix médium grave d’Anthéa me rapatrie dans le monde réel. Je lui roule un patin, prêt à remettre le couvert mais elle insiste, c’est d’une nourriture plus substantielle dont elle a besoin. Résigné, je m’arrache du pieu, direction la taverna. Je foule l’herbe tendre de la moquette, dans une symphonie d’effluves floraux. Le lis d’un jour au puissant parfum de muguet le dispute au jasmin sensuel et fruité, presqu’animal, et aux gardénias immaculés tout en vanille subtile. Au détour d’un rosier grimpant je tombe sur un labo sophistiqué avec, au milieu, une table et des chaises design.

…la suite demain…

« MARS 2221, roman » (chap 44 : « Photon mapping », suite et fin)

Plus je relis avec vous « MARS 2221, roman », plus je suis certain de  jamais remettre les pieds chez un libraire indépendant (rires). Du moins pas avant que ces braves gens aient compris l’intérêt vital que représente l’impression à la demande  pour 1) la littérature inventive et intelligente 2) les amateur(e)s de littérature inventive et intelligente 3) les libraires suffisamment inventifs et intelligents pour espérer atteindre un jour à un semblant d’indépendance.

résumé : Peregrin SF4, mode d’emploi…

– J’admets qu’une mise à niveau serait pas inutile.

– C’est très simple. Une fois à l’intérieur de l’habitacle, il suffit à Monsieur d’évoquer mentalement la destination que Monsieur désire rejoindre – réception, galerie commerciale, Shaker… – et, ce faisant, appliquer la paume contre la cloison.

– L’enfance de l’art ! Et pour appeler l’habitacle ?

– Monsieur toquera légèrement au lifter… Comme ceci…

Tout à la surprise causée par la déco rien moins qu’inattendue pour une chambre d’hôtel, j’ai pas noté, dans mon dos, la disparition de la cabine à l’intérieur du cylindre argenté que le groom appelle le « lifter ». Pour la faire réapparaître, un toc toc désinvolte contre le métal brillant et coucou, la revoilou ! Son empressement à sauter dedans me confirme que Spirou 2 a sa dose de mézigue pâteux.

– Je souhaite à Madame et Monsieur un séjour agréable. Pour tout complément d’information, technique ou administratif, un personnel dédié se tient jour et nuit à la disposition de Madame et Monsieur.

– Cool, mec. Nos amitiés à ce bon vieux marsupilami !

– Monsieur ?

– Nan rien. Merci pour tout.

Je tapote mes poches. Le vide me répond.

– Je suis ultra short en liquide juste là mais promis, si votre « Shaker » m’est favorable je saurai me souvenir de votre dévouement à la cause !

Une heure plus tard Anthéa, à poil et fraîche comme la rose, me rejoint sur le sofa interactif  (assise vibrante et le toutim) alors qu’à travers la baie vitrée je me perds dans la contemplation du lac. J’en suis à ma troisième vodka à l’herbe de bison.

– Phobos et Déimos ! Les lunes de Mars… Mate-moi leurs reflets sur l’eau… Comme ils ondulent au gré de la brise nocturne…  Plus vrais que nature !

Anthéa acquiesce. Et, normal, ramène sa science.

– Ces bonnes vieilles images de synthèse 3D ! Tu sais que les premières expérimentations de « photon mapping » remontent à 1994 ? T’étais déjà un grand garçon à l’époque ! Si tu t’étais intéressé à autre chose qu’à ta musique de loser, tu aurais appris que quand ils interagissent avec une surface, les photons virtuels peuvent être absorbés ou réfléchis. Les algorithmes du mapping n’ont plus qu’à prendre tout ça en compte et roule ma poule ! Tu vois lapin, moi ce que je trouve vraiment balèze c’est l’horizontalité du lac.

Je m’étais fait la même remarque en arrivant. Si on tient compte de l’inclinaison « manette de jeu vidéo vintage » voulue par les architectes du resort, la moquette devrait être en pente et le lac depuis longtemps à sec.

– Y aurait du graviton là-dessous que ça me surprendrait pas ! Tout se passe comme si, à Skomäth-Hellian, les théoriciens quantiques et les tenants de la relativité générale avaient fini par se mettre d’acc… Lapin ! T’exagères !

– T’aimes pas ?

– Si…

 

…demain chapter 45 : « Fallue normande »…

« MARS 2221, roman » (chap 44 : « Photon mapping », suite)

résumé : Lapsonami taquine le liftier…

– Adjacente au salon panoramique, la suite « Red Joy Recline », tout en marbre de Céphée est conçue pour offrir à notre aimable clientèle un sommeil d’une qualité rare.

– C’est pas un peu raide sous les reins, le marbre ? Pour compenser vous avez prévu un bon gros matelas, j’espère !

De boudeuse, l’expression du liftier vire à la réprobation pincée.

– Monsieur aime à plaisanter… Maintenant si Monsieur n’a plus besoin de moi…

– Grâce à tous ces précieux renseignements on devrait pouvoir s’en sortir, mec.  Ah, une dernière chose…

– Monsieur ?

Je sors le badge de ma poche.

– Auriez-vous une bonne table à me conseiller ?

Spirou 2 jette un œil blasé sur la lamelle de jarosite avant de rétorquer, son tact professionnel inentamé :

– La renommée du Red Joystick Shaker est loin d’être usurpée, que Monsieur en soit certain. La qualité des participants… Le plafond quasi illimité des mises…

Puis, pris d’un doute soudain :

– Cela dit… Skomäth-Hellian regorge d’établissements tout à fait honorables…

Serait-ce que finalement, au vu de mes manières douteuses il me calcule sans problème dans l’arrière-salle enfumée d’un bar à putes ?

– Nan, nan, votre « shaker » me va nickel, vieux. C’était histoire d’être sûr.

Pour le finir, à sa surprise un tantinet inquiète j’applique le badge contre son oreille.

– Écoutez attentivement ! Vous n’entendez pas une sorte de son complexe, résultante d’une vibration fondamentale de fréquence f1 à laquelle se superposent les vibrations harmoniques dont les fréquences sont ses multiples ?

– Puisque Monsieur le dit… Mais alors très très confusément… Maintenant si Monsieur m’y autorise, avant de prendre respectueusement congé de Monsieur il me reste à m’assurer que Monsieur est au fait du maniement du Peregrin SF4.

 

…la suite demain…

« MARS 2221, roman » (chap 44 : « Photon mapping »)

Eh oui les votants, le morveux continue à vous rouler dans la farine démocrateuse ! 🙂

Pas grave, il vous reste la relecture quotidienne et gratuite de « MARS 2221, roman » !

  1. Photon mapping

Un Spirou peut en cacher un autre. Le groom qui, sur l’injonction silencieuse d’Ovaï pointe sa casquette « boîte-à-camembert » hors du tube métallique est la copie conforme de celui qui proposait de porter nos bagages.

– *Liftier, escortez Madame et Monsieur jusqu’à leur biotope. Orbe Ti’ao Sä, alvéole 112.*

Spirou 2 se fend d’une courbette. Comme Spirou 1 il est équipé en cordes vocales.

– Si Madame et Monsieur veulent se donner la peine…

Sa main gantée de blanc nous indique respectueusement l’entrée de la cabine. Spacieuse, claire sans la moindre source de lumière apparente, molletonnée du sol au plafond, elle épouse au millimètre la forme du méga tube qui la contient.

Spirou 2 pianote sur un tableau de bord invisible. Les portes concaves se referment en silence et on décolle. Beurk, mon estomac a du mal à suivre.

– Super matos !

On le sait maintenant, Anthéa est passionnée de mécanique. Son compliment est reçu avec une fierté non dissimulée.

– L’habitacle modulaire du Peregrin SF4 génère des champs gravitationnels asymétriques dans son environnement immédiat, rendant possible son déplacement tridimensionnel dans les couloirs de communication…

Il a pas le temps de s’étendre. Une nouvelle nausée me signale qu’on est arrivé. Re manipe ésotérique, les portes de l’ « habitacle modulaire » se désunissent dans un pshhhh à peine audible et là… Et là !!!

J’en ai le souffle coupé.

En témoigne la tablette de Legrand – je sais plus laquelle, la verte ou la jaune ? Faudrait relire Hippocampe Twist – en tant que Sage entre les sages, avec Marcel (et son « Robert » chéri) des palaces, paraîtrait que j’en aie écumés quelques-uns ! De New York à Doha en passant par les Maldives, on les a fait swinguer les notes de frais de la GAMACON… Bon mais là on est carrément dans autre chose. Comment vous décrire le genre de mini éden qui s’offre à l’ébahissement du chaland ? On hésite à risquer un pied hors de l’ « habitacle modulaire » tellement on se dit qu’on nage en plein hologramme. Que si on fait mine de s’engager entre les parterres de coréopsis multicolores, les lupins au garde-à-vous, les massifs de pavots flamboyants, les lys d’un jour, les sédums, hémérocalles, jasmins et autres gardénias, on va passer direct à travers la moquette vert gazon. Spirou 2 réprime un sourire condescendant. Sans qu’il y ait écrit « immigrants Terreux en rupture de dortoir » sur nos fronts de voyageurs sans bagages, il a intégré qu’on est pas non plus les rupins intergalactiques qu’il a l’habitude de driver. Il récite méticuleusement :

– Le salon panoramique de l’alvéole se trouve au fond de l’allée principale. Sur votre gauche, les thermes. Tepidarium, caldarium, laconicum, spa, alcôve ciel de p…

– Alcôve ciel de pluie ? Yess !

Cédant à l’appel de la mousse de savon et du shampoing aux herbes, Anthéa nous laisse tomber comme des merdes.

Un chouye déstabilisé, Spirou 2 boucle quand même son tour du proprio.

– Le dégagement sur votre droite mène à la taverna. Le robot cuisinier y déclinera à votre intention une carte inépuisable de spécialités empruntées aux plus subtiles pratiques culinaires des Mille Galaxies.

– Cool. Sinon, y aurait pas un pieu quelque part ? Je sais pas si c’est l’air de l’Aquadrome, je sens monter une petite fatigue.

 

…la suite demain (et c’est pas des macronneries)…