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« MARS 2221, roman » (chap 33 : « Une couille quelquepart », suite)

Surtout pas me faire dire qu’un(e) libraire indépendant(e) (rires) a pas le droit de nourrir  son roi (sa reine) de client(e) de ses 300 pages de vraie fausse fiction tendance post « Amour, Gloire et Beauté » ou, à l’inverse, dépressives, sanguinolentes, réglementairement orientées inceste prépubère. Pas me faire dire non plus que les média se font un devoir économico culturel de promouvoir le créneau « faisez-moi peur même s’il est plus con que con et mille fois téléphoné, votre pitch de berde, Mernard ! ». Surtout pas me faire dire des choses telles !

Je sais bien que c’est en fin de foire que le talent d’un éditeur se mesure à la reprise de ses invendus.

Collection Lowbrow & Pop surrealists

En attendant on a « MARS 2221, roman » à relire ensemble (et améliorer si besoin est).

résumé : le monologue de Nivek Kuduort bascule dans le graveleux…

Sur fond de sarcasme caustique.

– …Quand j’y repense ! Lors de notre entrevue, j’avais mentionné non sans une certaine fierté le titre du mémoire de fin d’études qui, la veille, m’avait valu les compliments du jury. « La spatiolocalisation au 23ème siècle, un défi sociétal, un must managerial »… Le vieux pourri avait paru poliment intéressé sans plus. Que je croyais ! À peine de retour de notre voyage de noces – il avait tenu à nous offrir une croisière prestige en Antarctique, on en avait encore plein les mirettes des hologrammes de pingouins se prélassant sur la banquise artificielle – le fils de chien qui dorénavant me servait de beau-père me balance qu’il serait ravi de me faire visiter sa maternité. Sa « maternité », mon cul !

Anthéa et moi dressons l’oreille.

– Ce jour-là, entre deux couveuses et trois cuves de sperme congelé, la raclure m’a baisé la gueule dans les grandes largeurs. En daron attentif à sonder les forces et les faiblesses de l’infortuné queutard à qui il allait refiler les clés de la prunelle de ses yeux chassieux, il avait grillé l’importance capitale que j’attachais aux choses du compte en banque…

Rictus dégoûté. Nivek Kuduort serre les poings et shoote dans le sac.

– AÏÏÏÏÏÏEUHHHH !!! Mon ongle incarné ! Quelqu’un ici peut me dire pourquoi j’ai pas fait philo ???

Lui répondre qu’il est pas trop tard, lui suggérer de faire jouer ses équivalences… Mais la vision de la crosse du plasmok qui dépasse de sa poche obture mon sens de la répartie.

– …Dès lors le sournois m’a brossé un comparatif succinct entre le salaire d’un ingénieur en informatique en début de carrière, aussi qualifié soit-il, et le jackpot qu’il se proposait de partager avec moi au cas où j’accepterais de le seconder dans son plan de psychopathe.

– Son plan d’implant.

J’ai pas pu résister, surtout si c’est le dernier calembour que le destin m’accorde.

– Putain d’implant ! J’ai appris, par d’Avila toujours – avec ce que je lui lâche sur ma note de frais elle peut me tenir informé, la vieille peau – qu’à l’hosto ils étaient tombés dessus. Du coup maintenant il va falloir que je m’occupe aussi de ce fouille-merde de Kembaçkuk …

J’aime pas le « aussi ».

– Je peux vous dire, Maître, que j’en ai bavé à cause de son gadget ! Cette saloperie accapare l’intégralité de votre flux électromagnétique cérébral. Comment j’allais alimenter mon nano-traceur, moi ? L’encéphale indisponible, fallait lui trouver une autre source d’énergie, à ma petite merveille technologique. Bien sûr, il y avait la solution cardiaque. Le cœur est le plus puissant générateur électrique du corps humain. Soixante fois plus actif que l’encéphale ! Tellement actif justement que, branché sur lui elle aurait eu à subir des tonnes d’interférences. D’où la solution du testicule gauche ! « Gauche » si on veut !

Le voilà parti à se marrer.

 

… à suivre, pourquoi pas demain ?…

« MARS 2221 » (chap 26 : Mine de rien (suite et fin))

résumé : Anthéa et lapin se payent un urbex et orbex à la recherche de Darius…

Je congédie sans états d’âme le fantôme de la postière. Passée de l’autre côté du comptoir, Anthéa désire me montrer le tableau de mini écrans de contrôle, partie prenante du système de vidéo surveillance de la mine. Pour qui, pourquoi, trois d’entre eux continuent à faire le taf… Sur le premier on reconnait la façade devant laquelle le taxi nous a déposés. Un second balaie le couloir (je repère le logo des cagoinces). Sur le dernier écran on navigue en territoire inconnu. Un espace ouvert, assez vaste avec une sorte de caverne en arrière plan.

– Là… », Anthéa effleure l’écran d’un ongle perspicace, « …c’est pas un des rails qu’on apercevait d’en haut ?

– « Je me souviens ce jour-là, avec Darius on avait réussi à atteindre l’entrée des galeries… »

– Qu’est-ce que tu racontes ?

– Endymion Calmann-Lévy, mémoires d’outre-tombe.

– Ah ok.

Ma chérie à zéro nibards est full focus sur le haut de l’écran.

– J’ai vu un truc bouger… Choufe ! Ça recommence ! Là, par terre… À côté du rail… Tu vois pas ?

– Peut-être bien…

Elle se retourne.

– La porte là… Je parie qu’elle donne sur l’intérieur du bâtiment.

Sûre de son coup, Anthéa se dirige vers ladite porte. Miracle, la cellule photo électrique fonctionne toujours. Dans un grincement poli, le panneau métallique taché de rouille cède le passage.

– Qu’est-ce que je disais ! Ouah c’est gigantesque là-dedans !

Je sautille à mon tour jusqu’à l’ouverture. Sans commune mesure avec la vastitude colossale des Jardins, c’est vrai que le hangar en impose malgré tout. Il fallait ça pour accueillir les tunneliers, jumbos de forage, excavatrices et autres grues qui géraient le déchargement des wagonnets de retour des galeries. Fini les « tourniquets » des gueules noires aux poumons ravagés par la silicose. Plus question d’abattage manuel. Ni d’explosifs rudimentaires, aussi néfastes à la santé de l’artificier qu’à la stabilité de la roche environnante.

– Le loft que ça ferait ! » Anthéa délire, « …Aller prendre ta douche en skate, le matin ! Ton bowling perso…

– Ta note de chauffage perso…

– Là-bas dans le fond ! Le no man’s land de l’écran de contrôle !

Vivement intéressée par la large ouverture visible à la sortie du hall de gare, Anthéa slalome entre les barres d’alésage tordues, châssis, glissières rouillées et roues de coupe tournantes édentées en attente du passage des encombrants. Je fais ce que je peux pour lui filer le train mais mes prothèses me retardent.

– Attends-moi ! Où t’es ? Je te vois plus !

– Un bras !!! C’EST UN BRAS !!! Un putain de bras !!!

 

…demain, chap 27 : « Remote Control Impulse System »…

« MARS 2221 » (chap 26 : Mine de rien (suite))

« MARS 2221, roman », de la « science fiction »? ??  Pis quoi encore ? Déjà que la 4ème de couverture parle de  «dystopie» juste pour calmer les angoisses de « l’agence littéraire » qui gère ma paperasse de publication. Et oui, «Ferdinand» c’est bien Louis-Ferdinand Céline. Et non les libraires ont jamais rien eu d’« indépendant » à proposer. Leurs piles c’est pas gratos qu’ils peuvent se les construire. Parlant d’empilement, vous vous êtes enfin trouvé une série glauque et touche-pipi à souhait pour le we ?

 

 

résumé : plutôt que rentrer aux Jardins, Anthéa propose de descendre faire un tour à la mine désaffectée…

– Tu t’en sors avec tes béquilles ?

La porte glissière ayant cette fois accepté de me libérer, je lui montre si je m’en sors avec mes béquilles ! D’un coup de reins qui, contrairement à ma cheville, a rien perdu de sa vigueur je suis dehors avant qu’elle ait eu le temps de déplier ses grandes cannes. Elle me rattrape devant l’entrée principale du bâtiment alors que, dans son dos, le taxi regagne les hauteurs.

Le volet roulant est une version géante de celui de l’église de la Foi Universelle. Sauf qu’il est dûment verrouillé. En quelques enjambées félines Anthéa gagne le coin de la façade. Cri de victoire.

– « L’entrée des artistes », comme dirait Kyste Graisseux !

Je la rejoins. Sur le côté du hangar une porte, métallique elle aussi mais à taille humaine. Au-dessus il y a encore moyen de lire :

« AC  EIL – LIVRA S NS »

Ouv  tu e   9h / 17h »

Le battant fatigué cède à la poussée de ma béquille.

– Après toi s’il en reste !

Un long couloir chichement éclairé par des leds poussiéreux. On avance, moi clopin-clopinant derrière Anthéa sur le qui-vive. On laisse un chiottard sur la gauche avant de parvenir à une nouvelle porte, en verre dépoli. « Sonnez et entrez ». Pas contrariante  Anthéa presse le bouton et, ayant poussé la lourde, passe un museau furtif.

– Nobody in the class-room », elle me renseigne mezza voce.

– Monsieur Darius ? » je contribue, risquant un œil à mon tour.

Le silence persiste. On entre. La pièce baigne dans une lumière crépusculaire, vide de chez vide. Ambiance agence postale après un hold-up. Au mur, on dirait une vitrine d’exposition de timbres rares. Explosée. À défaut de casse du siècle les braqueurs ont dû se rabattre sur son contenu, des fois qu’il puisse intéresser un fourgue philatéliste. Un moment je crains que mon hippocampe ait finalement décidé de remettre le couvert. St Martin d’Étampes, années 2000. Je suis venu poster les formulaires provisoires de mes dernières bluettes à la SACEM, service des dépôts… « Veuillez  indiquer le titre de votre œuvre et en consigner les quatre premières mesures dans le rectangle prévu à cet effet, les paroles au-dessus de la musique ». La postière me sourit connivente. Je lui refile l’enveloppe en papier kraft, ça va encore me coûter des ronds ces conneries…

– Lapin, viens voir !

 

la suite demain si vous êtes sages

« MARS 2221, roman » (chapitre 26 : « Mine de rien »)

Ferdinand serait d’accord avec moi, au sortir de « Veiller sur elle », « Tout le bleu du ciel », « Les Yeux de Mona » et le toutim, c’est pas facile de continuer à respecter son libraire indépendant (rires) ». Heureusement y a Nextflip !

 

  1. Mine de rien

À l’hosto ils veulent me rapatrier aux Jardins en ambulance mais avec Anthéa on négocie l’anonymat d’un taxibot. Il y en a toujours deux ou trois qui patrouillent autour du CHU. Vautrés l’un contre l’autre sur la banquette on regarde défiler les préfabs métalliques. Un étage, deux, trois maxi, fenêtres PVC modèle unique. Ça et là, à la demande de quelque rupin désireux d’être reconnu comme tel, un architecte audacieux a tenté un balcon. J’ai même cru apercevoir un pot de géraniums en plastique. Il est pas loin de midi, les puits de lumière s’en donnent à cœur joie. Je sens le regard d’Anthéa sur mon pif boutonneux.

– Vous êtes quand même un drôle de coco, Maître !

– Nan ! Pas toi, Anthéa !

–  Pourquoi pas ? Tu captes à nouveau le cri du blé dans ton cristal de jarosite oui ou non ?

– Affirmatif. Hyper faiblard mais c’est bien le « son complexe représenté par une courbe périodique, non sinusoïdale et de forme compliquée », selon la définition de madame Dupouy.

– La prof coquine qui montrait sa culotte à toute la classe ? Écoute, à moins que tu sois pressé de retourner te perfectionner en agriculture hydroponique, aujourd’hui j’ai envie de faire les Jardins Suspendus buissonniers… Chauffeur ! Direction l’ancienne mine de fer !

Y a pas de chauffeur dans un taxibot mais le changement de destination a été reçu cinq sur cinq. Docile et silencieuse, la capsule antigrav s’engage dans une artère adjacente. Mêmes alignements de cubes sauf que de plus en plus vieillots, de plus en plus rouillés. À un moment on se retrouve au bord d’une immense cuvette poussiéreuse. Un nouveau « trou des Halles »  de quelques centaines de mètres de diamètre qui plonge par paliers vers une construction en partie délabrée. Une sorte de gare à l’abandon qui darde ses rails dans les flancs rocheux.

– Il y a moyen de descendre ? » Anthéa questionne.

En réponse le taxibot s’engage sur le semblant de piste circulaire. On se retrouve rapidement au pied de l’espèce de bâtisse. Elle a l’air moins pourave que vue d’en haut. Anthéa se tourne vers moi.

– Tu m’as pas parlé d’un gardien ?

– Si. Darius. Endymion en parlait en bien. Puisqu’on est là, on pourrait descendre lui faire part du décès de l’adjudant-chef. Pas plus joyeux que ça comme entrée en matière mais…

Joignant le geste à la parole, j’actionne le loquet d’ouverture de ma portière. Sans résultat.

Le montant de la course est de 9,7 kreds. Quel mode de règlement, je vous prie ?

La confiance règne dans les taxis martiens ! Je me demande combien de gros étourdis ayant omis de se munir de cash ou d’une carte de crédit valide ont été retrouvés momifiés à l’arrière d’une de ces brouettes en titane. Anthéa glisse un biffeton de 10 dans la tirette qui l’avale gloutonnement et recrache 3 boutons de braguette. Ils resteront dans la sébile. On a sa dignité.

 

la suite demain