Archives par mot-clé : Hippocampe Twist

« MARS 2221, roman » (chap 58 : « Bordel ! », suite et fin)

 

 

résumé : rerelire le bouquin (et Hippocampe Twist, tank à fer…)

La fermeture éclair de mon refuge toilé, capricieuse s’il en est, nécessite une manipulation tout en douceur. Il s’écoule une plombe avant que les premiers centimètres patiemment négociés m’autorisent à respirer l’air frais du matin.

Et là c’est la révélation. La résolution rien moins qu’inattendue du mystère du « ronflement aigu et continu » (définition académico laroussistique de « brondissement ») décrit plus haut. Des MOUCHES ! Des milliards de mouches patrouillant en escadrilles serrées, en quête d’un petit-déj’ roboratif. De grosses chemous vertes et bleues bourdonnant à l’envi. Messerschmitts miniatures à l’assaut d’un convoi allié dans une aventure de Battler Britton (Serge avait tous les numéros, au fait qu’est-ce qu’il devient, Serge ? Nos trajectoires existentielles ont tendance à tailler la route chacune de leur côté, faudrait quand même que je récupère ma Hagstrom, une gratte achetée à prix d’or dans un bouclard de Pigalle), les voici décrochant soudainement pour fondre sur leur objectif. Un objectif impossible à définir avec précision dans cet amoncellement en cours de compostage. Matelas éventrés, cartons d’emballage, chutes de moquette, billes de polystyrène mais aussi – mettant fin au mystère de la planche de fakir – bris de verre, éclats de céramique, ferraille de chantier, boîtes de conserve… Tu m’étonnes que j’ai mal partout this morning !

En tous cas ça schmecte. Ça pue, ça cogne, ça refoule des naseaux ! Mon sac de couchage est un pur écrin de violettes en comparaison.

Y a pas, la vie ça schmecte quand ça veut ! Quand ça oublie deux secondes son ascendance divine, glorieuse, majuscule, cerise sur le fraisier de la dure semaine de Création de toutes choses. Quand l’organique décide de s’affranchir du cadre de la bienséance. De l’idéal mystico romantique d’une espèce soi-disant « élue », de son égotisme prépubère qui lui fait reléguer au plan anecdotique, décoratif, le plus souvent alimentaire, l’existence des 1,999,999 autres. 1,999,999 espèces aussi vivantes qu’elle mais qu’elle a décrétées insuffisamment divines et, partant, qu’elle s’ingénie à pogromiser après les avoir doctement, scrupuleusement « découvertes » ( !), inventoriées, classifiées et dûment étiquetées, comme consigné sur sa feuille de route mosaïque.

 

Les dimensions de l’ouverture âprement négociée permettent maintenant de tenter une sortie. Pourtant j’hésite.

Remonter sur ma mob (au cas où elle voudrait bien redémarrer) ?

Direction le merdier des « adultes » ?

Puanteur pour puanteur, est-ce que ce serait pas « mieux pour moi » (haha, on arrivait quand même à se marrer dans ce putain de bahut ! Faudra que je couche tout ça sur le papier un jour, histoire d’occuper mes doigts quand ils seront trop vieux pour la pop music) de rester vivre avec les chemous ? Un remake intéressant de « Joë chez les fourmis»…

 

Sauf que pendant la nuit, sous la pression insistante de quelque rebut métallique aux bords tranchants, le tapis de sol a fini par perdre de sa superbe.

Allant jusqu’à concéder une large déchirure.

De laquelle dépassent, circonspectes quoique prêtes à l’action, les incisives acérées d’un gros rongeur patibulaire.

 

À 17 ans, claboter d’une leptospirose ? D’une fièvre d’Haverhill ? D’une tularémie ? D’un ictère infectieux ?  De la PESTE BUBONIQUE ???

Nan ce serait pas raisonnable.

 

…demain la postface…

 

« MARS 2221, roman » (chap 57 : « Marjolaine », suite et fin)

résumé : même constat qu’hier.

– Au fait, Gd’Ye-Asi, je voulais vous demander… l’asanjrat serait pas pour quelque chose dans l’histoire ?

Je pousse ma mobylette le plus loin possible à l’écart de la route. En provenance de laquelle les premiers froissements de tôle se font entendre. Ponctués des premiers « bloody hell ! » « Jesus fucking Christ », « you dick head !  », « stupid cow !  », « up your ass ! », « screw your aunty you motherfucker ! »… Comme quoi le flegme britannique a ses limites… 

– *Ce ne serait pas impossible. De récentes recherches ont mis en évidence un rapport de causalité entre l’ingestion même minime de dr’noä bleu et la manifestation, dans le métabolisme de certains composés, d’une singularité de la matière connue depuis des lustres partout dans les Mille Galaxies et tout récemment parvenue jusqu’à l’entendement de la pseudo science terreu… eu…eu…se.*

Si l’ingéson pouvait baisser l’écho sur la voix de ma correspondante, merci.

– *…Qui lui a, semble-t-il, donné un nom… Un nom  qui, comme presque toujours avec la pseudo science terreuse fait de l’effet sur le blaireau moyen mais ne veut strictement rien dire… Quelque chose comme l’ intrac … L’ intruc… *

Le bosquet refuge entraperçu n’est plus qu’à quelques yards …Quand le sol se dérobe ! Un ravin ! Dans ma surprise effrayée, je lâche le guidon. Entraînée par son pesant de ferraille, de guitare et de tente amarrée au porte-bagage, la 204 plonge. 

– L’« intrication quantique » ? « Couantique » comme prononçait Nicolas Martin et ses oreilles en carton ? C’était son kif à Nico le France-Culturiste, d’« esspliquer » des trucs auxquels il comprenait queud, rejoignant sur ce point couantité d’autres prétendus spécialistes de la couestion…

Clank ! Le ravin se révèle un modeste fossé dont ma bécane a presqu’aussitôt touché le fond, la roue avant se déboîtant sous le choc. Après tout elle est bien où elle est, ma noble monture ! Ma guitare pareil. «Un inconnu et sa guitare ♫ dans une rue pleine de brouillard ♫ Marjolaine, toi si jolie ♫… Je vais juste essayer de récupérer ma tente… Je la planterais bien dans la petite clairière entr’aperçue il y a une minute…

– * Nicolas Qui ?  Je vous reçois de plus en plus mal, Lapsonami…i…i…*

Faire gaffe à pas trébucher sur le sol inégal… Heureusement il est pas trop dur… Les sardines s’enfoncent assez profondément pour conférer à mon abri de toile monté à la one again un semblant de solidité…

– L’ « IN-TRI-CA-TION », Gd’Ye-Asi ! Le cat de Schrödinger, à la fois mort et vivant dans sa caisse à savon, ce genre de conneries…

La réponse mentale de Gd’Ye-Asi finit par me parvenir, altérée. D’où, je sais pas… De loin, très très très loin.

– * L’« intrication », oui c’est bien le mo… o… ot ! Écoutez, Lapsonami, il faut que vous sachiez une cho… o… ose ! Dans leur approche, les pseudo chercheurs terreux négligent une donnée essentielle. Le principe de non-localité… é… é des particules en état intriqué s’applique non seulement à l’espace mais au temps. AU TEMPS !!! … Lapsonami ? Lapson…  *

 

…demain 58ème et dernier chapitre : « Bordel ! »…

« MARS 2221, roman » (chap 57 : « Marjolaine », suite)

résumé : un chapter commace ça se résume pas.

Assis sur son barda au bord du trottoir, Monsieur le baron s’en remettra à présent à la compréhension des automobilistes. Il m’exhorte à pas m’en faire pour lui. Sourire du vieux de la vieille qu’en a vu d’autres, fermeté du pouce levé, il me file rencard ce soir au pub le plus proche de l’embarcadère. « Parie combien que j’y serai avant toi et ta mob pourave ? ». Slalomeur au jugé entre caisses en perdition et giga camtars impuissants à tronçonner ce mur de smog gélatineux, je me dis qu’il a gagné son pari. Un coup de volant incontrôlé, un coup de frein trop brusque et ma 204 peut vite se retrouver compressée comme un césar sous les roues du juggernaut de service. J’opte pour la prudence. Je me rabats tant bien que mal sur le bas-côté en misant (contre toute probabilité) sur une accalmie qui me permettrait de repartir comme en quarante. Au bout d’une demi-heure de poireau tout ce que je constate c’est que le brouillard a encore gagné en épaisseur. Sont-ce des arbres là-bas ? Ils seraient peut-être ok pour abriter une humble canadienne perdue dans la tourmente ? Arrêter les frais. Bivouaquer. Demain il fera jour comme on dit… Moins nuit en tous cas…

– *Lapsonami ? Répondez Lapsonami ! Vous êtes toujours avec moi ?*

– Tout dépend d’où vous émettez ! M’est avis que me je suis une fois encore pris les pinceaux dans un « fantasme parallèle induit par une similitude avec une situation dont j’ai gardé l’empreinte mémorielle » ! Un fantasme parallèle à côté duquel la madeleine du gars Proust fait figure de gadget à un galacton …Au cas peu probable où ce grand puceau cacochyme et sa prose à rallonge vous soient familiers, très chère Gd’Ye-Asi !

Un pilier en marbre de Céphée qui se dresse brusquement entre toi et les goguenots et bam ! Tes « facultés mnésiques surcompensées » recommencent à faire des leurs ! Mais ce serait trop long de rencarder Gd’Ye-Asi sur les aléas de mon hippocampe. Depuis ma chute dans l’escalier de la plantation de Valbueno (chute qui, on s’en souvient, avait réactivé l’option « cri du blé », rendant possible ma performance au Shaker) je croyais être débarrassé de ces intrusions plus que gênantes dans ce que le chirurgien Poutine appelait en se marrant doucement – je commence à comprendre pourquoi – la « réalité objective ».

 

la suite « demain » si mon hippocampe est d’accord

« MARS 2221, roman » (chap 56 : « Explication rationnelle »)

  1. Explication rationnelle

Le docteur Legrand brûlerait un cierge à Sainte Cellule Souche au constat de la précision avec laquelle me reviennent en mémoire les acteurs de cet été grandiose. Sandra for sure mais aussi Noddy, la toute jeune chamber maid au grand coeur qui s’était empressée de consoler St-Mégland. Noddy, ainsi surnommée en raison d’un TOC qui, les premières fois, nous avait un tantinet déroutés. « For no particular reason », quand ça la prenait voilà qu’elle nous gratifiait d’un inexplicable hochement de tête (« nod »).

Il y avait aussi Andrew, le butler, la trentaine déjà bien imbibée, qui nous faisait aimablement profiter des boutanches de Glenmorangie de vingt ans d’âge que sa fonction lui permettait de détourner.

Bah puisque ça intéresse la taulière du Red Joystick, je continue de dérouler.

– Le camping n’était qu’à un mile ou deux. Tous les soirs ou presque on jouait les rats d’hôtel pour des fiestas qui se prolongeaient souvent tard dans la nuit.

Jusqu’ici Gd’Ye-Asi  m’a écouté comme une enfant sage à qui on raconte une histoire. Elle plisse les yeux, signe d’une réflexion qui accentue son épicanthus naturel. Avant de laisser tomber :

– *D’où votre présence à proximité des ruines du vieux château au moment précis où ce groupe de pèlerins centauriens s’empêtraient dans leur mise en conformité plastique.*

Embarqué dans mon récit je mets un certain temps à tilter.

– Des pèlerins centauriens ? C’était ça le boucan ? Des pèlerins comme ceux d’Endymion  à Beinan ?

– *Qui est « Endymion » ?*

– Je vous expliquerai. Continuez, surtout continuez s’il vous plaît !

– *Eh bien il arrive parfois qu’une mise en conformité précipitée en sortie de TransVac provoque dans l’environnement spatiotemporel immédiat des émissions sonores incongrues…*

Sur le cul je suis. Il aura fallu deux siècles et demi pour me voir enfin délivrer une explication rationnelle à ce qui s’était passé cette nuit-là dans le parc du Glengarry Castle Hotel ! J’aimerais tellement que St-Mégland entende ça ! Des pèlerins centauriens !!! C’est évident ! Quoi d’autre ?

 

…la suite demain… 

« MARS 2221, roman » (chap 55 : « Le voyage en Calédonie », suite et fin)

– C’est vrai, j’ai oublié de vous dire. Si nous avions planté nos canadiennes encore humides sur la rive tourbeuse du Loch Oich c’était because la motorway nous ayant recrachés à Fort William, charmante bourgade de la côte ouest écossaise et que, posés sur un trottoir nous laissions refroidir nos bécanes, d’un bus régional était descendue une jolie brune aux yeux clairs. Qui s’était jetée dans les bras de monsieur le baron. La jolie brune s’appelait Sandra. St-Mégland la connaissait de l’été précédent. Profitant d’une place libre dans la 2CV d’aînés en partance pour l’Écosse, il était passé par Aberdeen, où elle habitait. Les géographes vous diront qu’Aberdeen se trouve sur la côte est. Ce qui rendait d’autant plus statistiquement improbables pareilles retrouvailles.

Dois-je entrer dans les détails ? Confesser à Gd’Ye-Asi ma culpabilité étonnée d’avoir au bout d’une quinzaine remplacé St-Mégland dans le cœur de la belle Calédonienne ? Nan, c’est le « Glengarry Castle Hotel » qui l’intéresse, Gd’Ye-Asi, pas ma vie sentimentale. Je me borne à lui expliquer qu’avant de remonter dans son bus, Sandra nous avait parlé d’un camping au bord du Loch Oich. À Invergarry très précisément. Un tout petit bled, une vingtaine de miles au nord de Fort William. À propos, si Sandra se trouvait à Fort William ce jour là c’est qu’elle profitait de son day-off hebdromadaire pour faire un brin de shopping. Un day-off octroyé par la direction du dortoir pour touristes chicos dans lequel elle avait dégotté un summer job de réceptionniste.

– Le « Glengarry Castle Hotel ».

Sourire entendu de Gd’Ye-Asi. Qui m’invite à poursuivre.

– Toute heureuse d’avoir retrouvé son french lover de l’année passée, Sandra nous invitait à venir casser une graine le soir même. Suffirait de se faire discrets, se faufiler à l’arrière de l’hôtel et grimper les trois étages de l’escalier de service sur la pointe des clarks, direction la staff-room.

 

…demain chap 56 : « Explication rationnelle »…