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« MARS 2221, roman » (chap 55 : « Le voyage en Calédonie »)

  1. Le voyage en Calédonie

Un peu que ça me parle, le « Glengarry Castle Hotel » ! Contre toute attente, avec St-Mégland on avait eu notre bac. Pour célébrer une connerie fallait bien enchaîner sur une autre ! L’Écosse à dos de Solex pour monsieur le baron, de mobylette pour moi. Malgré l’avis défavorable de Jipé-l’escroc-repenti rapport à la cruelle absence d’amortisseurs (lire Hippocampe Twist et plus faire caguer) j’avais craqué pour une « Peugeot 204 » (pas la bagnole du même nom bien sûr, pour la petite histoire sachez que j’ai jamais passé de permis de conduire quoi que ce soit). Un chouïa plus rapide qu’un Soldo, la 204 mais surtout, même sans amortisseurs elle tenait mieux la route. Voire l’autoroute. Comment ça, les véhicules de moins de 50 cm3 étaient pas admis sur l’autoroute ? Ok en France on se serait fait gauler au premier péage mais en Angleterre, les motorways c’était open bar alors pourquoi se gêner ? Vu la distance à parcourir, on allait quand même pas se farcir l’itinéraire vert !

Deux siècles et demi plus tard, les mânes des flics de la M1 qui avaient fini par se décider à nous interviewer en sont encore à se gratter la tête. Qu’est-ce que c’était que cet objet roulant non identifiable ? Avec le moteur sur la roue avant ! Au moins l’autre jeune froggy, là, aplati sous son sac-à-dos obèse, une guitare coincée entre les jambes, sa tente mal arrimée brinquebalant sur le porte-bagage, au moins sa monture ressemblait à quelque chose de techniquement apparenté à une motorbyke. D’où, chez nos mounted police, un réflexe international de solidarité motardière. Ils s’étaient contentés de checker nos assurances, sans se rencarder sur leurs cylindrées. Et nous avaient laissé repartir comme des fleurs nous faire klaxonner par les camions. Ils roulaient déjà super vite les cametars dans l’Angleterre des années Beatles. J’angoissais ma race à les voir raser le frêle esquif d’un St-Mégland en lutte permanente contre les bourrasques déstabilisantes, sa cape de Zorro transparente battant désespérément de l’aile dans la pluie diluvienne. Une pluie qui nous avait accompagnés sans mollir pendant des jours et des jours. Jusqu’à ce qu’à bout de forces, survivants incrédules, on échoue dans un camping au bord du Loch Oich. Un trou d’eau moins légendaire que le Loch Ness, son voisin du dessus sur la carte, mais qui valait quand même son pesant de pittoresque. C’était dans ses eaux saumâtres qu’en 1600 et quelques, le chef du clan Mac Donald avait ordonné qu’on lavât les têtes de sept enkiltés ennemis qu’il venait de faire sauter à la hache. Pour marquer le coup, un sculpteur inspiré avait bricolé une chouette colonne en pierre avec les sept tronches grimaçantes plantées au sommet. Pour autant la clientèle de l’épicerie-souvenirs-cigarettes-cartes postales qui s’était ensuite montée de l’autre côté de la route se bousculait pas au portillon. L’épicier avait largement le temps de nous remâcher l’anecdote chaque fois qu’on venait renouveler notre stock de ses délicieux petits pâtés en croûte passés de date qui composaient notre ordinaire.

Gd’Ye-Asi est un peu perdue. Le « Glengarry Castle Hotel » dans tout cela ?

 

…la suite demain…