« MARS 2221, roman » (chap 36 : « Emmanuel »)

  1. Emmanuel

 – * PARACELSE !!!*

Contrairement aux apparences, la tortue dormait pas. Après un long silence radio la voici qui montre à nouveau le bout de son nez frippé.

– * Philippus Theophrastus Aureolus Bombast von Hohenheim, dit « Paracelse ». Voilà qui ne me rajeunit pas ! Suite à un signalement de l’AIS, j’étais descendue sur Terra recadrer cet « alchimiste », selon la dénomination applicable aux originaux qui, depuis que votre espèce tient sur ses deux pattes, espèrent « transmuter » le plomb en or. Toujours cette fixation incompréhensible, à moins d’aimer les chasses d’eau qui fuient ! Bref, arrivée à Zurich, j’appris que Paracelse avait émigré à Salzbourg. Dommage car je comptais bien me gaver de chocolat suisse. Mon péché mignon ! Le chocolat au lait et aux noisettes. Les puristes ne jurent que par le chocolat noir mais je le digère mal, le chocolat noir.*

Anthéa d’approuver.

– Pareil. Ça me donne des aigreurs d’estomac.

-* Voire des selles liquides. Finalement, les « Salzburger Nockerl » que Theophrastus me servit autour d’une tasse de thé au gingembre étaient un régal des papilles. De plus, lors de notre entretien approfondi, l’homme ne se révéla pas aussi infréquentable qu’on m’avait dit. D’accord pour un médecin il passait plus de temps derrière ses cornues que dans son cabinet de consultation mais ne déclarait-il pas « préférer les sentiers et les routes aux universités où l’on n’apprend rien » ?*

Saine vision des choses !

J’ai pas pu me retenir. Un cri du cœur échappé d’Hippocampe Twist.

– * De plus, dûment questionné, celui qu’on appelait Paracelse me jura ses grands dieux qu’il n’avait recours à l’alchimie qu’aux fins de concocter des potions bénéfiques à ses patients et non en vue d’un quelconque enrichissement personnel. Pour un Terreux l’homme paraissait digne de confiance. Ayant rapidement mis fin aux sautillements nerveux auxquels je l’avais soumis préventivement et au terme d’un fort agréable moment passé en sa compagnie, je m’apprêtais à regagner le Void quand la porte d’un placard à balais s’était brusquement ouverte, projetant sur le sol, au milieu des bassines et des produits de ménage, une sorte de gnome à tête de fouine. « Emmanuel ! Encore à espionner le monde ! Combien de fois faudra-t-il que je me fâche ? ». Theophrastus s’était tourné vers moi et, l’air navré, m’avait expliqué que le petit mal élevé était un homoncule de sa fabrication. « Le premier et le dernier, je vous en fais la promesse ! Soit la qualité de la semence humaine qu’on m’a fournie est en cause, soit j’ai trop forcé sur l’arcanum pour la faire lever. Emmanuel s’avère ingérable ! In-gé-rable !!! Menteur, voleur, masturbateur compulsif, dysphonique… ». Le gnome de s’insurger : « Ze ne çuis pas dysnophique, vieux bouc ! Ze trouve ça plus zoli de parler comme ze parle, c’est bien mon droit, non ? Même que quand ze serai grand, vu que ze serai le sef du monde entier de tout l’univers, z’oblizerai tous les cèlzéceux à parler zoli comme moi ! »*

La tortue est une conteuse redoutable. On se croirait dans un remake burlesque de Pinocchio by Walt Disney. Mais où veut-elle en venir, avec son démiurge amateur débordé par sa création ?

 

nous le saurons demain, même heure, même écran…