« MARS 2221, roman (chap 20 : Le récit d’Endymion (1) (suite))

résumé : le narrateur écoute la narration de l’adjudant-chef en retraite Endymion Calmann-Lévy. Qui insiste pour lui remettre « une sorte d’hostie en cristal rougeâtre ». On frappe à la porte de la chambre…

– Alors monsieur Calmann-Lévy, ils étaient bons mes rav… Mes « jiaozis », devrais-je dire ! Mei-Li, une collègue qui est de là-bas, m’a appris que la recette des raviolis avait été inventée par un Chinois… Vos amis les Chinois ! Hi hi… Oh le vilain ! Il n’y a pas touché, à ses jiaozis réchauffés avec amour ! Le jeune homme non plus, on dirait…

D’Avila me regarde d’un air de reproche, remballe ses « jaozis » et retourne à Endymion.

– Lui il pourra se rattraper sur le petit-déjeuner mais vous monsieur Calmann, tintin ! Vous devez impérativement être à jeun pour l’intervention… Cela dit vous avez de la chance ! Toujours à cause de l’anesthésie à venir, ce soir vous êtes dispensé de Lopramédazolam ! N’en profitez pas pour remettre ça avec vos cauchemars guerriers ! Je compte sur vous, n’est-ce pas monsieur Calmann ?

L’infirmière, sa mine sévère et son sweet chariot disparaissent dans le couloir. Endymion bougonne.

– Pfff ! Elle serait mieux gaulée, je te lui prouverais que son « monsieur Calmann », entre les jambes, il a encore de quoi la faire grimper aux rideaux ! Avec ou sans Lopramédazolam !

Ricanement grivois ponctué d’une quinte de toux.

– Bon où j’en étais ? Ah oui, BRGTR hors service, je m’étais rabattu sur le bar de l’hôtel. Me voyant me morfondre tout seul devant mon vermouth cassis,  le barman me demande à tout hasard si je serais pas branché vieilles pierres. « Drôle de question », je lui réponds, « parce que quand j’étais petit, en vacances chez mes grands-parents je demandais tout le temps à mon grand-père de me repasser un vieux nanar du temps jadis sur son home cinéma pourave. Rien que le titre me faisait bidonner. « Les Aventuriers de l’Arche Perdue » ! Toute une époque ! « En ce cas » qu’il me fait, « pourquoi n’iriez-vous pas visiter le site archéologique de Beinan ? La municipalité investit une fortune dans son entretien et personne n’y va jamais. Pourtant les monolithes valent le détour ! Ces grosses pierres taillées, posées au milieu de nulle part… Dont certaines sont percées ! Les spécialistes s’interrogent toujours sur leur signification… Même chose pour les 1600 restes de sépultures ! Mais non, les touristes ils préfèrent aller faire trempette dans les micro billes en plastique et se faire sécher sur le sable radioactif… Le prenez pas pour vous mais si le client est roi, roi des quoi, ça reste à définir ! », qu’il ironise, le loufiat…

Comprenant qu’Endymion est parti pour la version longue je me cale mieux contre mes oreillers. Après tout, me farcir son journal de bord ou me planter dans mon comptage de moutons en l’écoutant ronfler…

– Je vais te dire, fiston. Pour ce qui est du pragmatisme, les Chinois – républicains ou cocos – ont des leçons à nous donner. La philosophie du « faire avec » ! Selon ces faces de pamplemousse avarié « S’il n’y avait pas de montagnes, les plaines n’apparaîtraient pas ». BRGTR avait ses ours ? J’en profiterais pour tripper « Indiana Jones » !

L’ex baroudeur fait mine de réfléchir.

– Ou « Han Solo » plutôt ! Cherche pas à comprendre, c’est dans un autre film qu’il avait dans sa collec, mon gramp’. Je me souviens plus du titre. Ça se passait dans l’espace… Bon mais le barman avait raison, y avait pas un chat sur le site archéologique. Je me baladais seulabre dans les allées, m’arrêtant devant une tombe par-ci, les fondations d’une baraque par là…  D’après les pancartes le tout remontait à entre 5000 et 2000 ans avant notre ère…. Les occupants des lieux avaient ensuite disparu sans laisser d’adresse. À en croire les spécialistes, il n’existait aucune preuve de leur filiation avec les tribus aborigènes de Taïwan, comme les Amis, les Paiwan ou les Puyuma. BRGTR était d’ascendance puyuma. À tous les coups ça l’aurait intéressée de visiter le site. Elle était pas que con BRGTR, tu sais ? Pour une Taïwanaise, je veux dire. Bref je venais d’apercevoir le fameux monolithe troué, sûr qu’il avait une drôle de dégaine ! Je faisais route dans sa direction quand un sifflement suraigu m’avait vrillé les tympans !

 

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