« MARS 2221, roman » (chap 18 : Une petite qui frétille (suite et fin))

Un mois et un jour après que j’aie commencé à relire avec vous « MARS 2221, roman », le plaisir est toujours le même. Je me régale de ce court instant quotidien pendant lequel me laissent en paix mes pensées mangeuses de raison de vivre… La shoah des Animaux encore et toujours, ses camps de la mort, ses dépeçages barbares, le déchaînement génocidaire d’Israël, son gang de voleurs, ses potes cow-boys endettés jusqu’au slip – ceci expliquant peut-être cela – dans un ping-pong sordide avec les dictateurs monomaniaques homophobes et misogynes les plus tarés du casting planétaire… Entre les deux, les enfants perdu(e)s qui se décharnent et/ou se noient en silence, les rescapé(e)s qu’on rejette à la mer… Et soudain pfffuit – comme une peinture de Magritte – quelques paragraphes-oxygène, quelques nuages d’un beau temps pas gnangnan avant de replonger dans la nuit des bipèdes à poil ras… Aujôrd’hui (comme on dit sur France Culture) « Une petite qui frétille » (suite et fin).

 

résumé : suite à une glissade, le narrateur se retrouve dans une chambre d’hosto qu’il doit partager avec un vétéran de la 7ème guerre d’indépendance taïwanaise…

L’infirmière éteint la lumière et se casse jusque la prochaine fois. C’est vrai qu’il m’a à la bonne, le vieux. La plastique d’Anthéa y est pour beaucoup, je dirais. Un jour ou deux après qu’on m’ait remonté des urgences, elle avait apporté une tablette de mots croisés. Kembaçkuk dit que ça peut aider pour ce que j’ai. Maladroitement, j’avais laissé choir le stylaser. Il avait roulé sous mon pieu. Anthéa s’était mise à quatre pattes pour le récupérer.

– De dos, votre amie me rappelle ma première épouse », m’avait confié le vieux militaire une fois Anthéa partie.

Il avait précisé sa pensée.

– Pour sûr qu’ elle était bonne, ma Delphana ! Aussi bonne que volage. Un jour – j’étais encore que caporal – je rentre d’une semaine de pacification à Guernesey, y avait un mot sur la table. « Me cherche pas, je suis partie avec le facteur ». Vous n’allez pas me croire mais, abstraction faite de la vaisselle d’une semaine qu’elle avait laissée dans l’évier, j’avais plutôt bien pris son abandon de poste. Après tout c’était elle ou ma carrière ! À la fin de chaque perm’,  je rentrais à la caserne plus crevé qu’en partant, tellement fallait pas lui en promettre à Delphana !

Son expression s’était faite songeuse.

– De toutes façons elle m’aurait pas suivi à Taipei. Elle avait décrété qu’elle aimait pas les Jaunes.

Le cornard magnanime avait cru bon d’ajouter, mezza voce :

– J’ai toujours pensé que c’était parce qu’elle faisait sienne la croyance selon laquelle Dame Nature avait escroqué les Asiatiques de quelques centimètres… stratégiques !

Rire égrillard.

– En cela Delphana n’accordait aucun crédit à un dicton qui avait cours dans ma jeunesse…

– « Mieux vaut une petite qui frétille qu’une grosse qui roupille » ?

Le vétéran en était resté bouche bée. J’avais pas jugé utile de lui expliquer que, contrairement aux apparences, ma jeunesse à moi précédait la sienne d’une bonne centaine d’années.

– Mon arrière-grand-père était agrégé de philosophie.

Pour finir de lui trouer le cul, à son adjudant, j’aurais pu lui dire que son patronyme m’était familier. Sauf que ce soir encore j’ai beau fouiller dans les coins et recoins de mon hippocampe « surcompensé », je saurais toujours pas dire pourquoi. Calmann-Lévy… Calmann-Lévy…  Ça sonne comme un label de plats cuisinés… Dans la lignée de « William Saurin » ou « Jackie et Michel »… Nan, pas « Jackie et Michel », « Jackie et Michel » c’était une maison d’édit…

 

demain chap 19 : « La tache sombre » …